Dans une entreprise détenue par plusieurs associés, les phases de transition à la tête de l’entreprise sont toujours une période délicate.
Pour vous aider à bien préparer ce type de situation, voici 4 questions à Estelle Ehrström, responsable d’agence Cerfrance et juriste fiscaliste.
1) Comment bien préparer le départ d’un associé dans une entreprise ?
Estelle EHRSTRÖM : « D’abord, rappelons que le départ d’un associé au sein d’une entreprise peut être dû à différents facteurs :
- Départ en retraite
- Transition professionnelle vers d’autres activités
- Choix personnel
- Maladie ou accident
Selon les cas, la situation peut donc être plus ou moins anticipable.
Lorsque le départ n’est pas lié à un élément imprévu et soudain, je pense d’abord à trois éléments me paraissant importants à prendre en compte :
- Anticiper et bien prendre le temps nécessaire: en moyenne, il est fréquent de compter une année complète pour bien préparer une transition d’associés, notamment pour une cession d’exploitation agricole par exemple. Ceci est variable en fonction de la structure de l’entreprise et du contexte.
Naturellement, cela dépend aussi de si l’on a déjà trouvé un nouvel associé ou non. Cette éventuelle recherche peut encore allonger les délais à prévoir.
- Déterminer le prix des parts sociales donc le prix de l’entreprise : cet élément est central pour pouvoir aborder la transition.
Les associés doivent d’ailleurs être en mesure de communiquer sur ce qu’il y a derrière le prix, afin de pouvoir le justifier concrètement et de convaincre un nouvel associé d’entrer au capital sur la base de ce prix.
- Bien communiquer entre l’équipe en place, le sortant et l’éventuel nouvel entrant : la qualité des échanges, la capacité à bien exprimer comment chacun voit les choses, notamment par rapport à l’avenir opérationnel est souvent un facteur de réussite ou d’échec. »
2) Quelles sont les formalités à prévoir ?
Estelle EHRSTRÖM : « D’abord, pour l’associé sortant, il est important de bien déterminer « qu’est-ce que je vends ? » et « à quel prix ? ».
Généralement, il y a deux cas de figure :
- Soit le prix est déjà déterminé et il fait l’objet d’un accord préalable entre les associés.
- Soit le prix n’est pas déterminé et il est donc nécessaire de l’établir. Une façon de procéder est de faire appel à nos équipes Cerfrance pour évaluer la valeur de l’entreprise, via une étude économique.
Pour évaluer la valeur d’une entreprise et donc celle de ses parts sociales, nous analysons :
- Sa rentabilité
- Sa notoriété
- Son bilan (actif – passif),
- Ses placements éventuels
Ensuite, il y a différentes étapes, avec :
- La consultation éventuelle de la banque, notamment si un montage financier est à préparer.
- Les aspects juridiques et fiscaux: quelle forme de cession ? Quel traitement de la plus-value ? Quelles conséquences fiscales ?
- Les éventuelles demandes de subvention : je pense en particulier au cas d’un repreneur d’exploitation agricole « jeune agriculteur ». S’il y a demande de subventions type Dotation Jeune Agriculteur (DJA), il faut prévoir minimum 6 mois uniquement pour ces démarches.
Globalement pour le domaine agricole, la transmission du foncier est complexe. Souvent, les associés ne sont pas propriétaires de l’ensemble du foncier, voire pas du tout. Il faut donc bien prévoir du temps pour gérer ces aspects. »
3) Y a-t-il des points de vigilance sur lesquels il convient d’être particulièrement attentif ?
Estelle EHRSTRÖM : « Lorsque nous accompagnons nos clients chefs d’entreprise ou responsables d’exploitation agricole sur une configuration de départ d’associé, nous donnons généralement les conseils suivants :
- Ne pas sous-estimer ou surestimer la valeur de l’entreprise : ceci peut être problématique, notamment vis-à-vis du droit de la famille, comme en cas de succession.
Je pense par exemple à quelqu’un qui veut transmettre son entreprise à l’un de ses enfants à un prix « minimal », dans l’idée de minimiser les droits de succession.
Ceci peut poser problème par la suite, notamment si quelques années plus tard, un autre des enfants souhaitent rejoindre l’affaire familiale. Il peut y avoir, dès lors, des désaccords importants sur le prix des parts et donc des conflits.
- Bien prendre en compte le régime matrimonial : dans le cas d’un régime matrimonial classique de mariage en communauté de bien, la vente de parts sociales d’entreprise de l’un des conjoints nécessite la signature des deux époux.
J’ai déjà accompagné une personne en instance de divorce, séparé dans les faits et pour qui il n’était pas envisageable d’obtenir la signature du conjoint. La situation était alors bloquée.
- Mettre en place un dialogue entre les différentes parties : une fois de plus, bien communiquer auprès de ses proches sur le projet de transmission est clé. Chacun doit pouvoir se prononcer. Et ceci n’est pas toujours évident.
- Bien prendre en compte l’impact de la fiscalité dans ses choix: je pense notamment à la plus-value.
Les régimes d’exonération sont nombreux et complexes. Il est important d’être au clair avec les cotisations sociales et impôts qui vont s’appliquer pour pouvoir prendre des décisions éclairées ».
4) En quoi un conseiller Cerfrance peut-il aider sur ces sujets ?
Estelle EHRSTRÖM : « Chez Cerfrance Isère-Drôme-Vaucluse, nous pouvons aider très concrètement, d’abord en établissant la valeur de l’entreprise.
Nous guidons aussi sur les aspects juridiques et nous aidons l’associé sortant à dégager les bons indicateurs pour appuyer sa réflexion.
Nous pouvons l’accompagner en établissant avec lui les étapes clés de la transmission, et en faisant un rétroplanning qui l’aide à s’organiser. S’il y a demande de subventions type DJA, nous pouvons également prendre en charge l’ensemble des démarches.
De même, nous pouvons accompagner aussi pour préparer les formalités vis-à-vis des commissaires aux comptes.
Et enfin, nous pouvons accompagner au dialogue entre l’associé et ses proches, et / ou l’associé et le candidat au rachat, ce qui est souvent au cœur de la réussite d’un projet de transmission d’entreprise. »