L’Entreprise Individuelle à Responsabilité Limitée (EIRL) est en passe de disparaître. Un projet de loi prévoit d’intégrer les spécificités de cette forme juridique au sein du statut global de l’Entreprise Individuelle (EI). Conséquences et alternatives.
Apparu en 2011, le statut de l’EIRL (Entreprise à Responsabilité Limitée) a été créé pour contrecarrer certains aspects potentiellement négatifs de l’EI (Entreprise Individuelle).
Il permet notamment de protéger le patrimoine de l’entrepreneur et donne la possibilité d’être assujetti à l’IS (impôt sur les sociétés) plutôt qu’à l’IR (impôt sur le revenu), ce qui peut se révéler fiscalement plus avantageux.
Malgré ces attraits apparents, le nombre d’EIRL créé a été bien en deçà des attentes et cette forme juridique est aujourd’hui appelée à disparaître.
Quelles conséquences pour votre entreprise si vous êtes actuellement en EIRL ? Et si vous envisagiez de vous lancer en EIRL, quel autre statut juridique choisir ?
Pour vous aider à y voir plus clair, voici une interview d’Emilie Moyen, Responsable d’Agence Cerfrance à Bourgoin-Jallieu (38300).
1) Qu’est-ce que le statut EIRL et pourquoi a-t-il été créé à l’origine ?
Emilie Moyen : « Le statut EIRL (Entreprise à Responsabilité Limitée) est une forme juridique permettant à un entrepreneur individuel de créer une entreprise en son nom propre, tout en protégeant son patrimoine.
Au sein de ce statut, une déclaration du patrimoine professionnel est déposée (véhicules, locaux professionnels, petit matériel, etc.) et la responsabilité de l’entrepreneur ne peut être engagée qu’à hauteur de ce qui figure sur cette liste.
L’EIRL donne également la possibilité d’être assujetti à l’Impôt sur les sociétés (IS), plutôt qu’à l’impôt sur le revenu (IR).
Cette option peut, dans certains cas, être fiscalement plus avantageuse, puisqu’elle permet d’être taxé sur ce que le chef d’entreprise se verse réellement plutôt que sur ce qu’il gagne en comptabilité.
Le statut EIRL a été créé pour offrir une protection patrimoniale au dirigeant.
Il répond en outre à deux désavantages de l’EI (Entreprise individuelle) :
- La non-maîtrise de la fiscalité, en particulier les premières années d’activité, du fait de revenus parfois très fluctuants pour le chef d’entreprise.
- La baisse de la capacité d’investissement car l’entrepreneur en EI est assujetti à l’IR (impôt sur le revenu), et cela revient à être taxé aussi sur de l’argent gardé en trésorerie, par exemple pour investir. »
2) Pourquoi le statut de l’EIRL va-t-il disparaître ?
Emilie Moyen : « En France, l’Entreprise Individuelle (EI) est le statut le plus représenté parmi les entreprises. C’est notamment celui de nombreux commerçants, artisans, etc.
Il y avait donc un large potentiel d’entrepreneurs susceptibles d’être intéressée par l’EIRL. Or, le statut n’a pas obtenu le succès escompté : environ 91 000 entreprises seulement l’ont adopté contre des millions potentiellement attendus.
Peu connu des banques, experts-comptables et conseillers financiers, ce statut a suscité des interrogations.
Par ailleurs, de nombreux entrepreneurs adoptant l’EI sont assez jeunes quand ils démarrent leur entreprise, et ils ont souvent assez peu de patrimoine, d’où peut-être un moindre intérêt pour ce statut. »
3) Quelles conséquences pratiques la disparition du statut EIRL va-t-elle entraîner et quelles sont les alternatives possibles ?
Emilie Moyen : « Les conséquences pratiques de la disparition de l’EIRL vont vraisemblablement être assez limitées.
Pour l’instant, cela reste à préciser car le projet de loi prévoit que ce soit désormais le statut de l’EI qui intègre par défaut les spécificités qui étaient propres à l’EIRL : la protection du patrimoine personnel et la possibilité d’opter pour l’IS.
En pratique pour les EIRL existantes, cela devrait donc consister à mettre à jour la dénomination et notamment les en-têtes de factures, devis, tampons, etc.
En termes d’alternatives, on peut penser en priorité à deux options :
- L’Entreprise Individuelle (EI) classique, en voyant la possibilité d’intégrer certaines clauses, à préciser avec le futur projet de loi.
- L’EURL, équivalent au format « société » avec un seul associé. Dans cette configuration, tout ce qui est propre à l’entreprise appartient à la société et non à l’individu.
Cette structure est un peu plus dense du point de vue administratif et donc un peu plus onéreuse mais elle peut être particulièrement pertinente en cas de projet de développement par exemple.
Globalement, pour choisir la bonne alternative, tout dépend des projets de l’entrepreneur. Il peut être très bénéfique de prévoir de temps en temps de faire le point sur sa situation de chef d’entreprise pour y adapter son entreprise. »
5) En quoi un conseiller Cerfrance peut-il aider sur ce sujet ?
Emilie Moyen : « En général, les changements législatifs, comme en ce moment celui de l’EIRL, sont toujours une bonne occasion de faire le point et de voir si les choix initialement pris pour l’entreprise sont toujours adaptés.
De nombreux éléments peuvent avoir changé dans le contexte et la situation du Chef d’entreprise sur les plans fiscaux, sociaux, comptables, ou du point de vue des risques encourus par l’entreprise.
Une PME en bonne santé économique n’est, malgré tout, pas à l’abri de certains évènements pouvant la mettre en grande difficulté : un litige aux Prud’hommes qui se passe mal, un gros accident sur un chantier, etc.
Selon le statut juridique de la structure, le chef d’entreprise peut être exposé plus ou moins directement à ce type de risques.
Les conseillers Cerfrance sont notamment là pour éclairer les chefs d’entreprise sur ces aspects. A travers des prévisionnels, des simulations, des analyses de patrimoine, ils les accompagnent pour leur permettre de faire les choix les plus adaptés à leur situation ».